Qui est la femme de Laurent Voulzy
Presque tout le monde en France connaît par cœur les nombreux succès de Voulzy, mais comme avec de nombreux génies de singles dans son style, nous entendons moins parler de ses albums. Et il s’avère que lorsque je voulais creuser cette partie de son travail, j’ai réalisé quelque chose que je ne savais pas : c’est que l’auteur de « Cocktail chez Mademoiselle » a en fait sorti quelques albums studio (huit au total, plus de quarante ans), et surtout beaucoup de ses succès — dont « Belle-Île -en-mer », » Rockcollection », « Les nuits sans Kim Wilde », « Le soleil donne » ou « Désir, désir » avec Véronique Jannot — ont été publiés en dehors de l’album. Je ne savais pas, et donc je le respecte encore plus. D’une part, vous devez toujours avoir la confiance (et le talent) pour convaincre votre label de publier autant de chansons en un seul coup, détachées d’une grande campagne. Aussi bien sûr parce qu’il témoigne dans « Lolo » d’un véritable amour du format roi de la musique pop, et quelque part, d’une légère indifférence quant au format de l’album.Et ce n’est pas facile d’être aussi radicalement poptimiste dans un pays aussi horriblement rockiste que la France, où même notre autre tueur historique, notre bien-aimé Daho, a joué le jeu du LP comme un « grand travail » malgré son penchant naturel pour les 45 tours.
Mais c’est un album Voulzy dont je veux parler aujourd’hui, et pas un album particulièrement obscur ou inconnu puisqu’il s’est vendu à 300 000 ex et a remporté la Victoire du meilleur album en 1993. Il n’y a que le troisième solo long format de Voulzy — on ne compte évidemment pas tous les 33 tours de Souchon dans lesquels il a joué depuis les années 1970 — mais comme le chanteur est déjà professionnel depuis deux bonnes décennies, il est arrivé à la fin du disque connu sous le nom de « maturité », ou de toute façon marquée par une certaine solennité, une vision lucide mais bienveillante du monde et de l’humanité. Il n’y a pas trop, sinon du tout, sa touche soft-rock, mélancolique mais insouciante, qui fantasme avec jubilation sur la pop californienne ou McCartney : « Rockcollection » ou« Grenadine Heart » sont loin. Au lieu de cela, vous pouvez deviner un quadra Lolo, qui pleure ses rêves, mais ça ne le dérange pas vraiment : c’est la teinte gris-blanc-rose qui est sur la couverture de l’album, quelque chose de rassurant mais sait qu’il faut passer à autre chose dans la vie, comme quand on décide d’acheter un gros break ou une berline. comme la Renault Safrane, qui venait d’être libéré à l’époque) pour mettre ses enfants ou même son chien, et que le temps est venu de vendre son petit Golf Cabriolet qui enlève le garage, votre femme commence à le trouver douloureux. D’où un sentiment à la fois protecteur et océanique, qui me rappelle un peu l’album Saphhire de John Martyn, enregistré à Compass, et beaucoup d’échos de ce son pop-rock généraliste mais très haut de gamme qui a duré vers le début des années 80 jusqu’à la fin des années 90 — il va de Talk Talk « mi-période » à beaucoup moins esthétique des trucs comme Sting ou Phil Collins.
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Comme la personnalité de Voulzy, c’est un album oùles émotions ne le ramènent jamais trop fort, les chansons se complètent doucement, répondent un peu, ne se dominent jamais. Il y a parfois des choses gnangnan — je pense surtout à la chanson « The Power of Flowers », les paroles si embarrassantes que cela sonne du Goldman — mais le tout est solide, profond, résistant à l’usure. Ce doit être l’ombination de l’écriture pop des années soixante et soixante-dix (qui reste l’ADN de l’écriture gracieuse de Laurent), des arrangements de synthétiseurs des années 80 très marqués, signé Michel Cœuriot, parfois un peu épais mais qui donnent beaucoup de force aux compos, et de l’ambiance légèrement celtique ou, disons, marine qui flotte ici et là… En tout cas, cela fonctionne très bien, et les textes (parfois de Souchon, parfois de Voulzy) fonctionnent généralement parfaitement avec l’atmosphère de franchise et de tristesse humide qui caractérise la musique.
Le plus grand succès est « Paradoxal Système », un chef-d’œuvre poignant, presque Italo, même s’il est sorti dans1992, si bien après la vogue Italo. C’est Celmar Engel (grand studio zicos de la variété 70/80, dont j’ai déjà parlé ici) et pas Cœuriot qui coorganise avec le chanteur, et le résultat ressemble à un très bon truc électro-pop « cool » qui pourrait sortir aujourd’hui. Surtout, les fans auront remarqué qu’il reprend une partie des accords de l’impressionnant « Aviator » que Voulzy avait composé quatre ans plus tôt pour son épouse, Véronique Jannot.
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Il est suivi par « Carib Islander », qui succède à un autre tour de force : celui de combiner un style très Fleetwood Mac 80 avec un climat breton, ou du moins hyper français. Ce n’est pas un hommage, c’est vraiment une réappropriation, avec des arrangements et des idées vocales que Lindsey Buckingham n’aurait sûrement jamais eu. Je me demandais naïvement comment un artiste si nourri de ses références pourrait avoir des fans qui préfèrent sa musique à celle de ses modèles, mais la réponse est simple : Voulzy est tellement passionné par les chansons qui l’ont façonné, il asi intégré les grilles de ses idoles, qu’il en a fait quelques-unes. quelque chose de personnel au point que nous finissons par ne pas entendre les racines résonner : il n’y a que lui, et sa langue. Parce qu’en fait, c’est aussi parce qu’il a cette voix française normale et ses mots font écho aux codes de notre chanson et de notre discours que Lolo a un tel succès ici, donc Brian Wilson, Fleetwood ou Steely Dan n’intéresse plus que les connaisseurs qui se disent, comme toi et moi.
Je mentionne ces deux morceaux mais honnêtement, tout le reste est au même niveau : comme je l’ai dit, c’est vraiment un archétype de disque solide et homogène, le genre de choses que vous devez avoir près de votre autoradio pour pleuvoir quand il pleut ou quand la nuit commence à tomber et que vous ne voyez pas les signes et la branche lignes. Et si jamais vous en avez assez, sachez que la discographie de Voulzy est extrêmement riche en petits trésors semi-cachés : il y a tellement de B-faces, d’instrumentaux (il a fait beaucoup de bibliothèque dans les années 70 !) et les versions alternatives,dont les fans qui assistent au forum qui lui est dédié ont rassemblé en six volumes tous ces titres édités en dehors des albums. Celui que je recommande aujourd’hui est une plage très dubisante — il y a déjà des échos jamaïcains dans certaines lignes de basse de Caché derrière, sur « Empty Bungalow » en particulier, bien que, bien sûr, cela ressemble plus à Police que King Tubby — qui s’intitule « Catherine laisse » et qui était la face B du single Goldmanien « Le pouvoir des fleurs ». La chanson sort l’année suivante dans un EP intitulé Les Faces Hidden Behind aux côtés de deux autres B-faces, une couverture de « Two To Tango » sous le nom de Captain Cat et un instrument appelé « Le train de 3:14 » sur lequel je suis tombé il y a trois ans dans la série sur le transport pour France Culture. En tout cas, ce Lolo « in dub » sort de quelque chose de cocooning mais tragique, absolument parfait, avec une guitare sous FX — un retard, je ne sais pas trop, pour que vous me le disiez — qui me rappelle un peu Insides, parmid’autres. C’est pour aujourd’hui : j’espère que vous allez capturer la beauté de cette variété luxueuse mais endommagée.